Dans mes articles précédents, j’ai parlé du futur de la radio et de ses diverses opportunités de croissance. Certaines d’entre elles sont tributaires du prochain examen par le CRTC du cadre réglementaire relatif à la radio. Bon nombre des règles prédéfinies il y a des dizaines d’années sont toujours en place et tant le Conseil que l’industrie accueillent favorablement l'occasion de les moderniser pour le 21e siècle. L’appel aux soumissions de tous les intervenants est désormais clos et, malgré leur divergence d’opinions, ces derniers sont tous d’accord pour que l'industrie demeure concurrentielle face à des acteurs numériques moins réglementés; les radiodiffuseurs et les entreprises connexes doivent s’assurer que les futures politiques du CRTC tiennent compte de leurs préoccupations communes.
Le Conseil a déclaré que l’examen lui permettra « d’établir un cadre réglementaire souple qui permettra à la radio commerciale de continuer à répondre de manière pertinente et efficace aux besoins et intérêts actuels et anticipés des Canadiens ». En fin de compte, il s'agit d’alléger la bureaucratie et permettre aux opérateurs de réagir plus facilement à l'évolution rapide du paysage.
Pour les membres de l’industrie, il s’agit d’une occasion de revoir certaines règles qui, à leur avis, restreignent leur capacité à demeurer compétitifs, surtout dans un monde numérique où leurs nouveaux rivaux dans l’espace audio ne sont pas actuellement soumis aux restrictions du gouvernement canadien.
Questions clés
L'Association canadienne des radiodiffuseurs et ses membres ont notamment soulevé les questions suivantes :
- Le nombre de stations FM qu’un radiodiffuseur peut détenir dans un marché donné (bien que tous soient d’accord pour dire que le nombre devrait augmenter, il n'y a pas de consensus sur ce que serait une augmentation raisonnable)
- Protection des technologies non réglementées (voir à ce que Google, Spotify etc. apportent leur juste part au développement des talents canadiens)
- Définition de la quantité de contenu canadien requis et la redéfinition de ce qui constitue le contenu canadien
Le contenu canadien
En tant que grand amateur de musique, j’ai toujours été intéressé aux règles auxquelles est assujetti le contenu canadien. Instaurées durant les années 70, ces règles visaient à promouvoir les musiciens, auteurs-compositeurs canadiens ainsi que l’industrie du disque de chez nous. Les mérites et l’impact de ces règles tant sur l’industrie de la radio que sur celle de la musique font depuis longtemps l’objet de débats mais elles sont là pour rester. La question reste de savoir comment les règles peuvent être modifiées pour que toutes les parties continuent à en bénéficier.
Si des changements subtils peuvent être apportés aux exigences relatives au contenu canadien, toutes les parties en sortiront gagnantes. Parmi les facteurs pouvant être pris en considération, notons la réduction du pourcentage du contenu des formats Rock classique et Succès populaires, élargir la définition du système MAPL (musique, artiste interprète, production et paroles) en vue d’inclure plus de talents locaux et d’accorder plus de valeur aux artistes émergents. Par exemple, The Guess Who, April Wine et Rush n’ont réellement pas besoin de l’exposition supplémentaire. Toutefois, les artistes émergents tels que Francis of Delirium, Pottery et Kiwi Jr. profiteraient de ce remaniement. Lorsque les stations de radio de succès contemporains (CHR) diffusent la musique des superstars de la pop canadiennes telles qu’Alessia Cara, Shawn Mendes et Justin Bieber, selon les définitions actuelles, beaucoup de leurs morceaux respectifs ne sont pas considérés comme du contenu canadien. Si les nouvelles directives sont mises en œuvre de manière intelligente, ces règles apporteraient des avantages considérables. Il serait plus facile pour les radiodiffuseurs de respecter leurs obligations réglementaires; les artistes canadiens établis bénéficieront d'une exposition encore plus grande, car une grande partie de leur répertoire sera désormais considérée comme du contenu canadien et une diminution des restrictions en matière de programmation permettra aux directeurs musicaux d’augmenter leur sélection musicale et d'attirer des auditeurs plus jeunes à la radio commerciale.
La manière d'élargir les sources de revenus
Je terminerai cette courte série par quelques réflexions sur la manière d'élargir les sources de revenus d'une station de radio à l’aide de nouveaux canaux technologiques. La radio dispose d’un auditoire engagé et fidèle qui adhère à la marque. Du mobile à la HD, de la baladodiffusion à l’insertion publicitaire dynamique (DAI), il existe un certain nombre de nouvelles opportunités par lesquelles une station peut étendre ou promouvoir un contenu nouveau et exclusif à son auditoire existant.
La baladodiffusion
Bien sûr, l'initiative de programmation émergente dont on parle le plus est la baladodiffusion. En tant qu’extension de la marque de la radio, elle permet un pivotement du rapport de « un à plusieurs » à un rapport « un à un », grâce à un contenu accrocheur. Ce médium peut être mieux adapté aux objectifs de marketing de certains annonceurs, et pourrait initier des clients réticents ou nouveaux à l’audio. La radio a une longueur d'avance sur la multitude de producteurs de baladodiffusion, car elle dispose déjà d’un auditoire ciblé auquel s'adresser à des fins de de marketing. Qu’il s’agisse de produire du nouveau contenu exclusif, de réorienter le contenu diffusé et de créer du contenu original sous la marque de commerce du client, les radiodiffuseurs reconnaissent le potentiel de croissance de ce nouveau médium, comme en témoignent les récentes initiatives mises place telles que IHeartRadio de Bell, Curiouscat de Corus, Frequency de Rogers, pour n'en citer que quelques-unes.
Les chaînes HD
La création de chaînes HD supplémentaires ouvre la voie à des opportunités. Premièrement, en utilisant une bande passante additionnelle sur leurs chaines HD, les stations ont l’occasion de mettre de l’avant des nouvelles idées qui ne conviennent peut-être pas à leur signal principal mais qui, en fin de compte, peuvent donner lieu à une programmation exceptionnelle. Deuxièmement, il pourrait s'agir d'un nouveau terrain de pratique pour la nouvelle génération de talents de la radio, remplaçant le contenu habituel du quart de nuit.
Voici quelques autres domaines de croissance potentielle des revenus ;
- L’utilisation de l’insertion publicitaire dynamique (DAI) pour régionaliser les publicités et cibler des groupes d’utilisateurs spécifiques avec un CPM plus élevé;
- La création de contenu sur mesure pour la distribution spécifique à un appareil; comme la série de récits décrite dans mon précédent billet, intitulé Pistes pour que la radio continue de prospérer dans le nouveau paysage audio ;
- Ou la monétisation de l’engagement au moyen des canaux de médias sociaux de la station.
L’avenir s’annonce prometteur pour l’industrie de la radio. Les articles précédents expliquent pourquoi la radio a été un médium tellement populaire dans le passé et comment elle peut évoluer pour rester pertinente à l'avenir. Aussi longtemps qu’elle continue de produire du contenu des plus prisés, de divertir, de s’adapter aux changements technologiques, d’influencer les politiques gouvernementales et d’emboiter le pas aux modèles économiques du 21ième siècle, je suis convaincu qu'il prospérera pour les générations à venir.